« Nous voulons proposer tous les éléments de la chaîne de mobilité »
Marc Wengler, Directeur Général des CFL, revient sur les points forts du Rapport annuel 2023 du Groupe.
Marc Wengler, le 10 juin, les CFL ont dévoilé leurs résultats de l’année 2023. Quel bilan tirez-vous personnellement de l’année écoulée ?
L’année écoulée fut une année de records et je tiens à remercier chaque collaborateur pour son engagement qui a contribué à aboutir à ces résultats exceptionnels. En termes de chiffre d’affaires, nous avons dépassé le milliard d’euros pour la troisième fois consécutive. Avec 28,7 millions de clients transportés dans nos trains, nous avons battu le record de 25 millions de passagers établi en 2019. Alors que nous étions encore nettement en dessous de ce niveau durant les trois dernières années, notamment en raison des suites de la pandémie, nous sommes maintenant de nouveau sur la bonne voie.
Le train reste donc un moyen de transport public attractif pour les déplacements invididuels ?
Oui, et les chiffres le montent aussi clairement. Le Luxembourg et la Grande Région sont en constante évolution, notamment sur le plan démographique. L’augmentation de la population s’accompagne de besoins de mobilité supplémentaires. Des besoins que nous ne pouvons pas résoudre uniquement par le biais du transport individuel. Dans ce contexte, la notion clé est la multimodalité. Le train a un rôle particulier à jouer dans la chaîne de mobilité au Luxembourg et dans ses environs. Aucun autre moyen de transport ne dispose de capacités comparables à celles du train qui est donc plus que jamais nécessaire. À nous de faire en sorte qu’il reste attractif…
Ce qui pose des défis…
La question de la capacité est particulièrement importante dans les transports publics. Proposer suffisamment des places assises qui correspondent à la demande de nos clients est une ligne directrice claire pour les CFL. Fin 2018, nous avons investi un montant record dans l’extension de notre flotte de trains voyageurs. Avec les 34 nouvelles automotrices Coradia et un budget de 400 millions d’euros, nous avons donné un signal clair en faveur du train. Nous pourrons ainsi proposer une augmentation de 46% du nombre de places assises d’ici 2025/26.
Mais il ne suffit pas de faire circuler plus de trains sur un réseau ferré qui, comme l’ont montré les dernières années, a atteint ses limites ?
C’est en effet pour cela que nous travaillons depuis quelques années à la décongestion et à la poursuite du développement du réseau ferré. Ces travaux des CFL se sont poursuivis en 2023, notamment pendant 301 jours de travail sur la substance du réseau ferré. Différents éléments sont en ligne de mire : d’une part l’entretien continu du réseau existant afin de continuer à garantir sécurité et confort aux collaborateurs et aux clients. D’autre part, les CFL travaillent à la création de pôles d’échange multimodaux L’année dernière, nous avons pu mettre à disposition en gare de Mersch une telle plateforme d’échange moderne qui répond aux différents besoins de mobilité de nos clients.
La mobilité de demain sera donc multimodale ?
Tout à fait. En tant que CFL, nous voulons proposer à nos clients tous les éléments de la chaîne de mobilité. En 2023, nous avons par exemple repris la gestion de l’ancien réseau mbox. Avec plus de 70 bikebox, nous offrons aux clients combinant le vélo à leur voyage en train la possibilité de garer leurs deux roues en toute sécurité et de poursuivre leur voyage en train. Depuis l’année dernière, les CFL consacrent également une stratégie spécifique au vélo. Voyager à vélo doit devenir plus facile. Pour nos clients, cela signifie plus d’espace dans les trains pour garer leur vélo en toute sécurité, des ascenseurs dans les gares qui facilitent le transport des vélos, des rigoles pour vélos qui facilitent leur transport à l’intérieur des gares, ainsi qu’une signalisation compréhensible.
La voiture reste cependant un maillon important de la chaîne de mobilité…
La voiture continue à jouer un rôle important dans la mobilité quotidienne de nombreux clients. Pour que ceux-ci puissent encore mieux combiner voiture et train, nous prévoyons également de renforcer les possibilités de parking à proximité immédiate des gares CFL. Rien qu’en 2023, la mise en service des P+R de Mersch et de Rodange nous a permis de mettre à disposition 2.000 places de parking supplémentaires, ce qui porte notre offre à 8.512 places dans l’ensemble de nos parkings. Un argument de poids pour les clients qui souhaitent profiter des avantages combinés de la voiture avec ceux du train.
Pour que les clients puissent rester mobiles au quotidien sans devoir forcément posséder leur propre voiture, nous continuons dans le même temps à étoffer l’offre de notre filiale CFL mobility et de sa marque Flex – en phase avec l’air du temps. De plus en plus de personnes renoncent à la voiture privée pour leurs déplacements quotidiens et recourent sciemment aux transports publics tout aussi efficaces et plus durables. Avec la flotte Flex, nous mettons à la disposition de nos clients des solutions de mobilité qui les aident à parcourir les premiers et les derniers kilomètres en autopartage. Un modèle qui a de l’avenir : l’année dernière, nous avons enregistré une augmentation de 25% du nombre de nos abonnés Flex. En matière de mobilité, on assiste véritablement à un changement de paradigme, à un changement de mentalité. Et c’est un train dans lequel nous voulons être bien positionnés.
« Par rapport à la route, le transport de marchandises par rail est plus durable. »
Marc Wengler, Directeur Général du Groupe CFL
Un changement de mentalité qui va au-delà du transport de personnes ?
Depuis plusieurs années, nous constatons également un changement de mentalité dans le domaine du transport de marchandises. Si nous voulons atteindre le « Green Deal » et les objectifs de réduction de CO2 de l’Union européenne, le secteur du transport doit devenir plus durable et plus innovant. Avec notre large gamme de solutions couvrant tous les maillons de la chaîne logistique, nous encourageons ce changement de mentalité de manière ciblée.
Par rapport à la route, le transport de marchandises par le rail est plus durable. Le rail émet neuf fois moins de CO2, provoque huit fois moins de pollution atmosphérique et consomme six fois moins d’énergie. Des arguments clairs en faveur du rail. Outre la durabilité, nos activités de fret offrent les avantages d’un « one-stop-shop ». Tous les besoins logistiques sont couverts par nos services de fret et nos clients n’ont donc affaire qu’à un seul interlocuteur.
En 2023, le groupe CFL a pu intégrer un autre pilier dans le secteur du fret.
La multimodalité joue un rôle important dans notre stratégie, dans les Activités Fret aussi ! Si nous voulons continuer à nous positionner comme hub logistique de premier plan en Europe, il est important de pouvoir couvrir un large éventail de solutions logistiques. C’est dans cet esprit que le Groupe CFL a acquis l’année dernière des parts du principal exploitant du Port der Mertert. Grâce à cette décision stratégique, nous avons désormais une approche « trimodale » de nos activités de fret, c’est-à-dire que nous couvrons le rail, la route et la mer. C’est un élément supplémentaire dans le cadre de nos activités qui reliaient déjà les grands ports maritimes européens.
« Pour rester attractif, le transport de marchandises par rail et nécessite un cadre approprié. »
Marc Wengler, Directeur Général du Groupe CFL
D’un point de vue économique, 2023 a été une année plus difficile pour de nombreux clients, notamment dans le contexte de la guerre en Ukraine et des suites de la pandémie. Quel a été l’impact de ces événements sur le chiffre d’affaires du groupe CFL ?
D’un point de vue économique, nous ressentons l’influence de ces événements dans tous les domaines, y compris dans le secteur du fret. Par rapport aux années précédentes, le chiffre d’affaires de nos Activités Fret a également légèrement diminué (-0,8%). En tant que CFL, nous sommes toutefois convaincus que le rail, et notamment le transport innovant de marchandises, jouera un rôle clé à l’avenir. C’est pourquoi nous avons continué à investir durant les dernières années. Le transport de marchandises par rail doit rester attractif et nécessite pour cela des conditions et un cadre appropriés – je pense ici à la directive européenne sur les « gigaliners », qui favorise clairement la route.
« Le rail est incontournable en Europe. »
Marc Wengler, Directeur Général du Groupe CFL
En tant que Groupe CFL, nous voulons nous positionner sur un large spectre et continuer à fournir des arguments en faveur d’un transport ferroviaire plus durable. Le Groupe CFL a, par exemple, investi dans dix nouvelles locomotives Traxx-MS3. Elles disposent d’une propulsion hybride et peuvent être utilisées sur les réseaux ferroviaires au Luxembourg, en Allemagne et en Pologne – sans qu’il soit nécessaire de changer de locomotive aux frontières respectives. Cela permet à nos clients d’économiser du temps et donc de l’argent. D’autres pays suivront et nous permettront ainsi d’utiliser ces locomotives sur les axes nord/sud et ouest/est. Comme l’année dernière, nous allons continuer à miser sur la création et le développement de partenariats stratégiques qui consolident le rôle du rail en matière de transport de marchandises.
C’est dans cet esprit qu’un nouveau partenariat a, par exemple, été conclu en 2023 avec Bertani Trasporti – un signe clair de la poursuite du renforcement de nos activités sur le marché est-européen. Une troisième grue portique a également été installée fin 2022 sur le site de notre terminal intermodal de Bettembourg-Dudelange. Les capacités apportées par cet outil de travail sont indispensables pour être prêts à répondre à l’augmentation du fret dans les prochaines années. D’ici 2030, nous estimons que 30% de marchandises supplémentaires seront transportées en Europe. Une croissance que la route seule ne pourra pas absorber. En tant que Groupe CFL, nous considérons notre gamme de produits intégrés comme une solution face à ce défi. Plus que jamais, le rail est donc incontournable en Europe.